Si tu t’intéresses de près ou même de loin à l’entrainement en course à pied et en trail, tu as certainement déjà entendu parler des séances de fractionné comme la classique 30/30 sur laquelle j’ai d’ailleurs fait une vidéo où j’expliquais ses avantages (LE FRACTIONNÉ 30/30). Il y a aussi l’autre classique 1’/1’ ou des formats aux fractions plus longues comme 8’/3’…

Petit rappel pour les néophytes : le premier chiffre ou nombre représente le temps d’effort alors que le suivant représente le temps de récupération. Par exemple le 30/30 c’est 30’’ à VMA (vitesse maximale aérobie) suivie de 30’’ de récupération de façon active à allure très lente ou alors de façon passive en étant au repos.

Mais ce que l’on retrouve moins dans les programmes conventionnels ce sont les séances à variation d’allure ou allure progressive. En effet, au lieu d’avoir des vitesses instantanées, il faudra accélérer et décélérer progressivement d’une allure à une autre sur un temps donné en fonction de la qualité que l’on souhaite travailler.

Comment ça marche exactement ? Quelle différence avec les séances classiques ? Quels sont les avantages et inconvénients ? C’est ce que nous allons aborder aujourd’hui.

 


 

LE FRACTIONNÉ CLASSIQUE

Dans un premier temps je vais reprendre les principes des séances de fractionné classique et les qualités qu’elles ciblent précisément. Puis je ferai de même avec les séances à allure progressive.

Les séances classiques comme le 30/30 sont des séances à allure instantanée ce qui veut dire que pendant 30’’ nous sommes à VMA et les 30 suivantes en récupération. Évidemment il y a une phase d’accélération et décélération qu’on négligera ici car ce sont des périodes très courtes. Généralement, lorsque la séance est représentée par un graphique, elle apparait sous forme d’histogramme régulier comme tu peux le voir ci-dessous.

Représentation graphique d’une séance classique de fractionné[/caption]

 

L’exemple du 30/30 est l’exemple typique d’un entrainement pour améliorer la VMA mais bien entendu il est possible de travailler d’autres qualités comme

  • La force avec par exemple 10’’ à allure max suivie de 3’ de récupération à allure lente ou marché
  • L’endurance de force avec 30’’ à allure max et 3’ de récupération
  • Le seuil anaérobie avec par exemple 8’ d’effort au seuil anaérobie lactique suivie de 3’ de récupération.

 

 

Donc on constate bien que les possibilités de combinaisons sont très larges afin de les adapter au niveau et à l’objectif de l’athlète (10km, semi, trail court, marathon trail etc…).

 

 

FRACTIONNÉ À VARIATION D’ALLURE

Quant aux séances à variation d’allure (ou allure progressive), le but est généralement d’accélérer ou décélérer progressivement tout en balayant un spectre donné d’allure en partant de la plus faible jusqu’à la plus extrême comme le sprint. Cela dépendra de la séance et des qualités que l’on souhaite cibler. Comme tu peux le voir sur l’illustration, les séances à allure progressive sont représentées par un aspect pyramidal lorsqu’elles apparaissent sous forme de graphique.

Représentation graphique d’une séance à allure progressive[/caption]

Pour reprendre le système que j’ai déjà expérimenté et utilise toujours à l’heure actuelle, celui de l’entrainement BILLATRAINING élaboré par Véronique BILLAT et son équipe, le principe consiste entre autres à respecter des allures qui sont uniquement basées sur les sensations de l’athlète et se divise en gros en trois catégories : facile, moyen et dur. A partir de là on peut évidemment inclure des nuances comme par exemple « bas du facile », « haut du moyen » ou « très dur ». Les qualités ciblées au nombre de quatre sont abordées de façon différente par rapport aux séances classiques de fractionné :

  • La force qui comme son nom l’indique consiste à travailler sa puissance musculaire
  • L’acidose qui permet d’augmenter sa tolérance aux lactates mais aussi de mieux recycler ces derniers en énergie.
  • Le cardio qui améliore les capacités cardio-vasculaires pendant l’effort mais aussi la récupération.
  • La perception qui est destinée à nous familiariser avec l’évolution de nos sensations à l’effort tout en aiguisant sa propre perception.

 

La plupart des séances conçues par BILLATRAINING sont à variation d’allure mais il arrive de retrouver des séances à allure instantanée voire un mélange des deux comme tu peux le voir sur l’illustration qui représente une séance cardio.

Lors de cette dernière il faut dans une première partie répéter deux fois 5’ d’accélération du facile au dur puis 5’ de décélération du dur au facile. Il faut en quelque sorte passer environ 1’40’’ dans chaque sensation. Une fois ces deux vagues terminées, on enchaine sur la deuxième partie à savoir 6x 30’’ à allure max suivi de 3’ à allure facile.

 

Exemple d’une séance cardio à variation d’allure Billatraining[/caption]

 

Il s’agit ici d’une séance cardio et comme je l’ai expliqué précédemment, elle est destinée à améliorer nos capacités du système cardio vasculaire en atteignant et en maintenant des fréquences cardiaques élevées. Mais en y regardant de plus près et lorsque l’on compare avec les séances plus classiques, on peut constater que la deuxième partie par exemple est quasiment le cas typique d’une séance d’endurance de force. A la seule différence qu’il faut ici maintenir une allure facile que l’on peut associer à de l’endurance fondamentale alors que dans les séances classiques la récupération se fait à allure lente.

Malgré que cette séance soit prioritairement ciblée sur l’aspect cardio, l’un des avantages de cet approche de l’entrainement réside dans le fait que les qualités ciblées lors d’une seule séance peuvent être multiples.

 

Pour conclure cette partie et en reprenant ce que dit Véronique BILLAT au sujet de sa méthode, c’est qu’une course, qu’elle soit sur route ou en trail, n’est au final que des accélérations et décélérations en fonction de ce que nous dicte notre cerveau et de notre capacité à relancer grâce à une bonne réserve de puissance. Ceci a d’ailleurs été une nouvelle fois illustré avec le nouveau record du monde d’ELIUD KIPCHOGE sur le marathon de Berlin 2022. Grâce à COROS qui a fourni l’analyse des datas de sa course (illustration ci-dessous), on observe clairement que sur les 20 premiers kilomètres les allures (en vert) ne sont pas linéaires. Nous voyons que le départ est très rapide à environ 2’33’’/km (23,6km/h), puis ça descend progressivement pour relancer et remonter, puis redescendre etc… donc nous sommes bien sur des variations d’allure où le coureur s’est créé une fenêtre de « récupération » à des allures inférieures de son allure de course mais néanmoins élevées pour mieux relancer par la suite.

 

 

FRACTIONNÉ VS VARIATION D’ALLURE

Maintenant que l’on connait précisément la différence entre le fractionné classique et les variations d’allure, on va bien entendu se poser la question de savoir laquelle de ces méthodes est la plus efficace ? Quelles sont les avantages et les inconvénients.

 

LES AVANTAGES

  • Le fractionné classique a l’avantage de nous faire maintenir une vitesse ciblée de façon plus précise et sur une période plus longue. En effet sur une séance à variation d’allure il serait plus contraignant de maintenir 2’ à VMA alors que nous aurions pris le temps d’accélérer jusqu’à cette vitesse pendant 5’. De la fatigue se serait installée, se serait accumulée et le temps passé ainsi que le nombre de répétition ne pourraient pas être aussi nombreux. De plus, le fractionné classique à l’avantage aussi d’être plus abordable au niveau de la mise en pratique sur le terrain.

 

  • Les séances à variations d’allure quant à elles ont des avantages multiples quelle que soit la qualité travaillée. Tout d’abord, malgré que ce ne soit pas systématique, elles permettent de balayer tout le spectre des allures dans une seule séance, à savoir de l’endurance fondamentale jusqu’à des allures très rapides voire du sprint tout en passant par le seuil. Ceci nous permet donc d’être beaucoup plus l’aise et de gérer au mieux nos allures en fonctions des sensations.
    Un autre avantage et non des moindres est à noter sur les séances à variation d’allure : pour rappel, VO2max est le volume maximal d’oxygène que notre organisme peut exploiter lors d’un effort et il est un des facteurs de la performance. Malgré qu’il soit corrélé à la VMA car c’est à cette vitesse qu’il est atteint, Véronique BILLAT a démontré dans ses travaux qu’il était possible de maintenir ce VO2max à des vitesses légèrement inférieures à VMA donc de prolonger le temps passé à VO2max*. Pour résumer, les séances à variations d’allure semblent plus logiquement efficaces pour améliorer son VO2max car on y passe tout simplement plus de temps.
    Enfin dans le protocole d’entrainement BILLATRAINING, il n’est pas question d’allure mais plutôt de sensation du jour que nous renvoie notre cerveau au moment de l’effort. Donc inutile de regarder sa montre toutes les 5’’ ou de se stresser à chaque répétition pour savoir si l’on respecte une allure donnée ou non. Une séance est réussie à partir du moment où l’on est allé jusqu’au bout en respectant le protocole et ses sensations.

 

LES INCONVÉNIENTS

Évidemment nous allons retrouver dans les inconvénients du fractionné classique ou des variations d’allure ce que l’un possède et que l’autre n’a pas.

 

  • Dans le fractionné classique les séances sont la plupart du temps données à des allures instantanées qu’il faut respecter assez fidèlement afin de les valider. On ne passera pas par tout le spectre de nos allures respectives. Par exemple sur une séance de 30/30, je travaillerai uniquement à VMA et à vitesse lente ou endurance fondamentale. Dans ce cas-là, les allures de seuil ne seront pas sollicitées.
    Le second point négatif, qui est plus d’ordre personnel avec mon propre retour d’expérience est que le fractionné a tendance à être plus traumatisant. Les accélérations instantanées, les freinages et surtout s’obliger à respecter une allure précise, sont pour moi des facteurs limitants à l’optimisation d’une séance. Cela dit je ne remets pas du tout en cause l’efficacité de cette méthode qui a largement fait ses preuves. Comme je l’ai dit précédemment c’est uniquement personnel.
  • Dans les variations d’allure il y a aussi quelques inconvénients qu’il faut souligner comme la mise en place du protocole d’une séance qui n’est pas aussi évidente et intuitive qu’avec un fractionné classique. En effet il faudra tout d’abord apprendre à gérer ses allures et ses propres sensations sans pour autant se référer à sa montre toutes les 5’’.
    Ensuite la gestion du temps d’accélération et de décélération à effectuer dans chaque zone d’intensité n’est pas évidente au début. Je ne vais pas mentir, c’est assez difficile de se repérer. Même si ce n’est pas impossible sans, mieux vaut passer par une programmation sur sa montre GPS pour optimiser le dérouler de la séance.
    Enfin, on pourrait croire que les séances à variation d’allure seraient plus simples mais c’est une fausse idée reçue. Crois-moi qu’il vaut mieux arriver bien armé et en possession de tous tes moyens physiques et psychologiques à chacune d’entre elles car ce sont des séances qui sollicitent généralement de hautes intensités comme nous le précisions précédemment. Tu sors radicalement de ta zone de confort. C’est pour cette raison qu’il est important de bien gérer ses allures car si l’on reprend l’exemple de la séance cardio précédente, tu accélères pendant 5’ jusqu’à une vitesse dure, mais il ne faut surtout pas couper par la suite en relâchant l’effort brutalement. Au contraire, il faut encore maintenir une intensité dure, descendre progressivement vers le moyen pour finir au facile. Lorsque nous sommes habitués au fractionné classique où l’on coupe brutalement son effort pour récupérer, il n’est pas évident d’assimiler ce phénomène de décélération progressive alors que nous sommes dans une zone inconfortable au niveau de l’effort.

 


 

CONCLUSION

 

Maintenant tu connais clairement la différence qu’il y a entre ces deux méthodes d’entrainement, leurs avantages ainsi que leurs inconvénients. A ce que je peux voir et entendre autour de moi, il semblerait même que les variations d’allure soient de plus en plus utilisées dans l’entrainement des sports d’endurance.
Comme c’est le cas en course sur route et nous l’avons vu avec le cas du marathon de KIPCHOGE à Berlin, c’est exactement pareil en trail running, une course est une variation d’allure perpetuelle. Et cela est d’autant plus vrai en trail car le dénivelé étant de la partie, il faut sans cesse adapter notre effort tout d’abord à notre niveau mais aussi au profil de course et à la technicité du terrain.

Pour conclure sur un avis personnel, c’est pour cette raison que j’utilise toujours la méthode d’entrainement BILLATRAINING car ayant expérimenté aussi les méthodes plus conventionnelles, je n’ai jamais autant été à l’aise et efficace (à mon humble niveau bien entendu) qu’avec cette approche de l’entrainement que propose la plateforme de Véronique BILLAT. Les séances de cette dernière demeurent les fondations, les bases de mon entrainement même s’il m’arrive désormais, grâce à mon expérience, d’inclure quelques séances spécifiques personnelles lors des phases de préparation.

 

 

Source :

The sustainability of VO2max : Effect of decreasing the workload (Billat et al. 2012)

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